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Chemin avec de la neige
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Hegel
L’Esprit est sorti de la Vie Substantielle

                                                 

        A l’étage où se trouve présentement l'esprit conscient de soi-même, on voit que l’esprit est sorti de la vie substantielle qu’il menait jadis dans l'élément de la pensée, qu’il est, au-delà de cette immédiateté de sa foi, au-delà de la satisfaction et de la sécurité naissant de la certitude  que la conscience possédait  de sa réconciliation  avec l’essence et la présence universelle — extérieure  et intérieure — de cette essence.

        Il n’est pas seulement passé au-delà dans l'autre extrême, dans la réflexion sans substance de soi-même, mails il est même encore plus loin.  Non seulement il a perdu sa vie essentielle mais il est conscient de cette perte et de la finité qui est son contenu. Se détournant de ces détritus, confessant sa misère, la maudissant, il attend maintenant de la philosophie non pas tant le savoir de ce qu'il est que le moyen de restaurer grâce à elle cette substantialité et cette densité de l'être.

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       Pour répondre à ce besoin, la philosophie ne doit pas tant ouvrir la clôture de la substance, et l'élever à la conscience de soi, non pas tant reconduire la conscience chaotique à l'ordre pensé et à la simplicité du concept, qu'elle ne doit confondre les spécifications de la pensée, opprimer le concept différenciant et restaurer le sentiment de l'essence, produire non tant l'intellection que l'édification.

      Le beau, le sacré, l'éternel, la religion et l'amour sont les appâts requis pour réveiller l'envie de mordre. Non le concept, mais l'extase, non la froide et progressive nécessité de la chose même, mais le fervent enthousiasme doivent être ce qui soutient et répand la richesse de la substance.

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        Hegel, Préface à la Phénoménologie de l’Esprit, Éditions Aubier, Paris, traduction Jean Hyppolite, pp. 25-27.

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